Oeuvres de Clémentine-Hélène Dufau

Maurice Rostand

Tombé sous le charme d’une toile de Clémentine-Hélène Dufau (1869-1937), L’Automne, présentée au Salon de 1902, Rostand lui en demande une adaptation pour sa bibliothèque. Ces nus « insinuent en nous, une suggestion de saveur de fruit mûr, ferme et rond, comme d’une fleur qui serait déjà presque un fruit. »

De 1906 à 1912, Hélène Dufau travaille à Arnaga sur des décors et réalise des portraits de la famille.

Le musée possède ainsi :

-          Deux grands panneaux pour la bibliothèque : Le printemps et Les Cygnes noirs 

-          Trois médaillons de femmes nues dans l’escalier

-          Cinq portraits : Maurice Rostand dans le jardin, Rosemonde dans le Boudoir, Rosemonde dans la bibliothèque, Edmond au dalmacien (dessin), Maurice en dandy (reproduction avec autographe original).

Voir toutes les peintures de Clémentine-Hélène Dufau

Clémentine-Hélène Dufau et Arnaga

Ses premières œuvres sont admises au Salon des Artistes Français dès 1889, elle a vingt ans. En 1909, reconnue par ses pairs et célébrée par la critique, sa notoriété lui vaut d’être décorée du titre de chevalier de la Légion d’Honneur.

 

Si Edmond Rostand choisit Hélène Dufau pour participer à la création des décors de sa demeure, c’est parce qu’il a vu exposé au Salon des Artistes Français de 1902, L’Automne, achetée par l’État. Cette toile, le poète l’admire vraiment ; à tel point qu’il souhaite en posséder l’exacte réplique pour orner sa bibliothèque.

                              

Malheureusement pour lui, les règlements concernant les commandes et achats de l’État sont très stricts. Il obtient le droit de faire reproduire le motif. En revanche, l’Administration, en charge de délivrer cette autorisation, impose qu’il y ait des modifications notoires afin que l’œuvre ne puisse pas être confondue avec l’originale.

 

Rostand commande également à l’artiste un pendant qui célèbre une nouvelle fois la beauté de la nature pendant la saison automnale et celle du corps humain dans sa plus parfaite nudité. En 1906, Mlle Dufau présente au Salon, un Fragment de la décoration pour la maison du poète Edmond Rostand dont le titre définitif sera Les Cygnes noirs. Dans la Gazette des Beaux-Arts de janvier 1906, Paul Jamot donne une description juste du fragment de la décoration pour la maison du poète Rostand : « Je ne vois au Salon cette année que les nus de Melle Dufau qui insinuent en nous, une suggestion de saveur de fruit mûr,  ferme et rond, comme d’une fleur qui serait déjà presqu’un fruit.»

 

L’oeuvre d’Hélène Dufau n’a pas cessé d’évoluer. Alors que ses débuts se placent sous le signe du réalisme (1895-1897), rapidement ses peintures s’éloignent de l’académisme. Et alors qu’elle s’affirme, elle commence à se tourner vers une oeuvre symboliste.

 

Le symbolisme est une réaction au naturalisme. Les symbolistes ne peignent pas fidèlement l’objet, contrairement aux naturalistes, mais recherchent une impression, une sensation, qui évoquent un monde idéal et ils privilégient l’expression des états d’âmes.

 

Les symboles permettent d’atteindre la réalité supérieure de la sensibilité. Le symbolisme se définit par opposition au formalisme : il renoue avec le sujet et marque un retour à l’introspection, à la religion outrée. C’est une peinture spirituelle.

 

Hélène Dufau travaille à Arnaga pendant 6 ans, de 1906 à 1912. Elle est la seule artiste à s’être plusieurs fois déplacée jusqu’à la villa, ceci étant facilité par le fait qu’elle a acheté une villa à Guéthary dans laquelle elle réside plusieurs mois dans l’année.

Portrait de l'artiste 1911

Dans le cadre de l’opération nationale « Culture près de chez vous », financée par le Ministère de la Culture, le musée d’Orsay met en dépôt à la Villa Arnaga depuis 2019 l’autoportrait de Clémentine-Hélène Dufau, Portrait de l’artiste, daté de 1911 (RF 1978-40). Huile sur toile de 181 x 70 cm.le cadre de l’opération nationale « Culture près de chez vous », financée par le Ministère de la Culture, le musée d’Orsay met en dépôt à la Villa Arnaga depuis 2019 l’autoportrait de Clémentine-Hélène Dufau, Portrait de l’artiste, daté de 1911 (RF 1978-40). Huile sur toile de 181 x 70 cm.

Un critique de l’époque la décrit « Elancée, d’allure énergique, les traits dénotant une ferme volonté, les yeux francs et lucides, le front ample ».

A l’âge de 42 ans, Clémentine-Hélène se représente elle-même dans un autoportrait. Sa biographe Mayi Milhou le commente : « De petite taille, Hélène a choisi pour se grandir un format en hauteur ; le tableau mesure 2 mètres pour une largeur de 0,90m. La silhouette ainsi élancée, vêtue d’une superbe robe d’intérieur bleu soutaché d’or, à la traine légère, elle semble marcher sur la pointe des pieds, élégante façon de rétablir un équilibre compromis par sa claudication. Elle se présente de trois-quarts, se dirigeant vers une porte vitrée qu’elle fait mine d’ouvrir, la tête tournée vers nous comme pour nous inviter à la suivre. Sur un meuble, à droite, dans un vase à deux anses bleues, sa fleur préférée, en bouquet : la rose, toujours la rose. »

Deux portraits : jeune homme et jeune femme

Vers 1909

Huile sur toile. H. 100 L. 87cm.

Acquis par la commune de Cambo-les-Bains en 2021

Le tableau du jeune homme

Les traits du jeune homme lisant, accoudé à la balustrade laissent à penser qu’il s’agit de Maurice Rostand, fils aîné du poète.  Le décor, inspiré du Bosquet des Dômes des jardins du Château de Versailles, intègre des éléments du Pays basque (la Rhune en arrière-plan).

 

Le tableau de jeune femme

Le profil de la jeune femme ressemble à celui de la peintre elle-même. Elle observe un paysage de bord de mer évoquant les plages du Pays Basque.

 

Ces deux tableaux forment une paire : la ligne d’horizon se prolonge de part et d’autre et assure la continuité entre les deux tableaux. Cet homme et cette femme sont liés par la composition : l’homme lit et la femme le regarde. L’homme est indifférent et la femme songeuse.

 

S’il s’agit bien d’un autoportrait, l’image prend alors un sens profond. Clémentine-Hélène Dufau se prit en effet d’un amour éperdu à sens unique, à partir de 1906, pour Maurice Rostand. Passion amoureuse qu’elle qualifiait elle-même de « folle », puisqu’elle avait 37 ans et l’adolescent 15, qui ne cachait pas ses penchants homosexuels. Cet amour tortura l’artiste pendant de nombreuses années.

Ces deux tableaux seraient alors un moyen de transcender cet amour en un amour altruiste, presque apaisé par la douceur des lieux et des couleurs. Elle montre à Maurice qu’elle est là, à côté de lui, vigilante et douce.